Karl Schwarzschild

Ce qui m’émeut le plus, ce n’est pas l’horreur de la guerre, c’est de lire, parsemé dans les carnets et les lettres de Karl Schwarzschild ce champ lexical de la joie. Quand il voyage jusqu’au front « joyeusement » (sic), qu’au plus profond de la souffrance, au bord de la mort, il a encore un bon mot. Ce qui m’émeut, c’est cette incroyable capacité à rester humain face aux ténèbres, d’accrocher encore la lumière. C’est quand je le lis encore s’enthousiasmer des petites choses du quotidien et de s’émerveiller d’une équation de physique au cœur de l’innommable. Tout converge vers cette image, cette essence – les eulogies des physiciens de part et d’autre de l’océan, la beauté de ce qu’il laisse en vingt ans de recherche – : cet homme, c’était un noyau actif de galaxie. Ces objets monumentaux, les plus lumineux de l’Univers, qui rayonnent par accrétion de matière sur un trou noir supermassif central, et que l’on peut repérer de par leur puissance joyeuse, jusqu’aux confins de l’espace-temps. Être un homme et avoir su créer tant de lumière heureuse autour des noirceurs humaines : voilà qui est bouleversant.

Karl Schwarzschild à Göttingen, avec son carnet qui ne le quittait jamais, dans les années 1900.