Au lendemain de mon arrivée, dimanche à 6h, sur le sol devant la salle de bain, j’hésite entre le rire et l’atterrement. Urgences en solitaire : rien de cassé, poignet foulé. Cataplasme anisé couleur excrément : médecine chinoise. La veille, cette post-doctorante qui vient me chercher à l’aéroport, puis invitée à dîner et présentée aux professeurs par Z., comme si j’étais une personne importante. La réunion de collaboration G., nous la menons épaule contre épaule avec O., dans notre connivence parfaite, nous atténuons ou résolvons ce qu’il y a de tensions, l’un et l’autre chacun de notre côté, et bien sûr ensemble avec nos sensibilités combinées – et cinq heures de sommeil par nuit. Les résultats présentés pendant la semaine (dont une bonne fraction produite par P. – je glisse à O. : avec vous deux, je suis doublement bien mariée !) donnent l’ampleur de la marche franchie, et l’enthousiasme est contagieux quelle que soit la culture. Ma virée à l’hôpital en solo m’a valu le respect des collaborateurs chinois, alors quand je leur dis que je n’ai pas peur du désert, de ne pas me laver, du trou en guise de toilettes, du froid et des planches dures, mais que je ne veux pas partager de dortoir avec O. (et cinq autres collègues), ils ont l’amabilité de ne pas me taxer directement de précieuse. Au banquet, Z., passablement ivre, vient me balancer de doux éloges – qui vont dans le sens de la « déesse autoritaire et bienveillante ». Amusant contraste, au moment des adieux, Pf. me sort : « Quelle chance d’avoir une personne aussi nice que toi à la tête de cette collaboration. Et entre asiatiques, on se comprend si bien. » Moi qui craignais une réserve liée à mes origines japonaises, en particulier à Nanjing, soulagée de voir que mes collègues ne m’ont pas étiquetée des horreurs historiques passées.
À l’aéroport, Z. m’écrit encore de très jolies choses. Et il termine sur une capture d’écran. « Je voulais afficher ça pendant la réunion, mais je n’en ai pas trouvé l’occasion. Je te l’envoie à toi. » J’embarque pour une longue série de vols, avec une radio du poignet comme souvenir imprimé, et les larmes aux yeux. C’est une citation de Confucius :
Recevoir la visite d’amis venant de loin, n’est ce pas le plus grand bonheur ?