Pour m’enfoncer davantage, j’ai bouffé Toxic Data1. Pourquoi mon éditeur m’en a-t-il suggéré la lecture hier ? Ah oui, parce que nous échangions sur le CNRS et #JeQuitteX.
Il me l’avait offert il y a deux ans, et je l’avais commodément caché dans ma penderie à vêtements, sous mes jeans et mes robes. Lieu idéal pour un livre. On voit le niveau d’autruchitude.
Évidemment, cette lecture n’a pas soigné mon agonie. En toutes lettres et en macroscopes scintillants, un monde qui s’effrite de l’intérieur. Et malgré les dix-huit actions que David Chavalarias, l’auteur, essaie de présenter pour donner de l’espoir, la terrifiante dystopie en embuscade dans mon esprit.
Ça m’a rappelé aussi cette réalité : ce n’est pas la qualité d’un livre qui fera son succès mais bien ce qu’en feront les horreurs addictives que je listais dans mon billet précédent. Ces attentions par paquets de likes et de vues qu’il faut attirer, manipuler, entrer dans leur ronde échoïque par les moyens qui m’échappent et que je ne veux pas jouer.
Je ne sais que faire pour sortir de cette agonie. Tout fermer, au risque de dégringoler ? Quel niveau de filtre ? Quelle lucidité ? Je suis la taupe qui a enfin daigné regarder vers la surface, mais je suis encore sous terre, je suis toute petite, que ce soit dans le monde de la recherche ou dans les livres, quelle que soit ma fonction, je sens que tout m’échappe et me coule d’entre les doigts. En vérité tout nous échappe, et je ne sais pas, plus, ce que je peux, dois faire, pour ne pas être complètement inutile, comment jouer les quelques cartes qu’on m’a attribuées [la direction d’un laboratoire, un peu de médiatisation, la possibilité de m’exprimer dans un livre, être porte-parole d’une expérience internationale] ? Quand ? De quelle façon ? Y a-t-il même un sens à me poser ces questions, car ce sont à coup sûr des illusions de cartes, des mirages de cartes.
- Toxic Data, de David Chavalarias, directeur de recherche au CNRS, Ed. Flammarion, 2022. Essai édifiant sur la manipulation de notre opinion et de la géopolitique mondiale par les réseaux sociaux. ↩︎
